2022/35 Les maisons vides, Laurine Thizy. L'Olivier, 01/2022. 268 p. *****
Gabrielle, treize ans, court dans la nuit, les paumes des mains brulées par les broderies d'un coussin, pour se réfugier auprès de son arrière-grand-mère qui vient tout juste de mourir. Gabrielle est née un soit de mai, trois mois trop tôt, et sa survie tient du miracle. D'un côté, l'adolescence de la jeune fille ; de l'autre, son enfance. Les deux récits convergent peu-à-peu, jusqu'au moment charnière de la mort de l'arrière-grand-mère, celle qui a traversé la frontière il y a si longtemps pour fuir Franco et qui, à la fin de sa vie, a perdu la tête. Et, comme des parenthèses, l'animation faite par un duo de clowns dans le service de pédiatrie d'un hôpital, racontée par un mystérieux narrateur dont on découvrira l'identité à la toute fin du récit. La construction est habile, et si le style parait un peu emprunté au début, il s'affirme et gagne en fluidité. La plume de Laurine Thizy devient efficace, avec cette rare qualité de montrer plutôt que d'expliquer. En filigrane dans ce joli récit est abordée la thématique du corps dans tous ses états : celui du nourrisson né trop tôt, aux membres flétris pas plus épais qu'un doigt ; celui qui, inflexible machine bien rodée, se plie aux exercices de la GRS ; celui qui éructe des araignées venues du fond de la gorge et font tousser Gabrielle à perdre haleine ; enfin c'est aussi le corps de la Mémé qui vieillit, s'ankylose et se grippe. Un premier roman très prometteur.
Roman lu dans le cadre des "68 premières fois"
Catégorie : Littérature française
sport / corps / famille / maladie /
Posté le 09/05/2022 à 17:54