Justice indienne, David Heska Wanbli Weiden / trad. de l'anglais. Gallmeister, 01/2021. 407 p. *****
Dans la réserve indienne de Rosebud, dans le Dakota du Sud, où vivent les Indiens Iakotas, l'état n'intervient pas dans les enquêtes de la plupart des crimes, et la police locale a peu de moyens. Les pires abus restent souvent impunis. Virgil Wounded Horse, qui élève seul son neveu Nathan, est devenu justicier et venge les victimes selon leur demande. Le père de son ex compagne le charge d'une mission : traquer des trafiquants de drogue, qui commencent à introduire de l'héroïne dans la réserve. Un problème qui le touche d'autant plus que son neveu vient d'être victime d'une overdose.
Virgil et Nathan n'en ont pas fini avec la drogue. On découvre dans le casier du jeune homme, au lycée, une importante quantité de morphiniques. Suspecté de faire partie d'un réseau, Nathan est incarcéré, et ne doit sa libération qu'à condition de coopérer avec la police en se faisant passer pour un acheteur auprès des dealers. Contraint et forcé, Virgil joue le jeu et mêle sa propre traque au travail des autorités. Roman social tout autant que thriller, le récit fait la part belle aux conditions de vie des Indiens dans la réserve – dont il ne fait pas oublier qu'on leur a confisqué leurs terres pour les parquer dans un territoire réduit ; la population est pauvre et s'alimente mal, au point qu'un chef vient assurer des formations pour rééduquer les habitants et leur apprendre à cuisiner avec les produits locaux ; on tâche de perpétuer les traditions et on pratique des rituels que Virgil a rejetés jusqu'à ce qu'il redécouvre le pouvoir de la sagesse des anciens. L'homme est une sorte de mercenaire, qui n'hésite pas à faire usage d'une violence extrême puisqu'on le paie pour cela, mais pas seulement. Virgil n'est pas une brute : si on a recours à lui, c'est bien à cause de la faillite des autorités. La justice indienne traditionnelle, qui consiste à refuser de frapper celui qu'on a vaincu, est certes à l'opposé de celle que pratique Virgil, mais il agit faute d'une justice efficace et équitable, et même si on ne partage pas cette idée de se substituer à un système pénal, on ne peut que partager la colère de l'homme face à l'impunité des criminels. Vaste question, qui donne à ce récit une dimension politique et morale très intéressante.
Catégorie : Littérature étrangère
Amérindiens
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Posté le 19/04/2021 à 17:43