Dernières fleurs avant la fin du monde, Nicolas Carteret. Le Livre de Poche, 01/2020. 182 p. 7,20 € ****
Dans ce monde uniformément gris, les abeilles ont disparu. Sous peine de voir l'humanité mourir, les hommes se chargent de la pollinisation, et répandent à la main le pollen sur les fleurs des arbres fruitiers. Albert Villeneuve est journalier dans une section dont il est chef. La révolte gronde parmi les ouvriers qui travaillent dans des conditions très dures, pour un maigre salaire payé en pommes de terre. Il est convoqué chez le Duc, propriétaire plénipotentiaire de la plantation craint par tous. Qu'a-t-il fait de mal ? Rien, on le charge simplement d'apprendre à lire à Apolline, la fille du Duc…
L'histoire a lieu dans une époque indéterminée, après une probable catastrophe. De ce qui a fait disparaître le soleil et donc les abeilles, on n'en saura rien. Au-delà de la peinture sociale du travail acharné, de la rentabilité à tout prix et des inégalités, le roman s'attache au personnage d'Albert. A l'instar de ses collègues, il souffre de ce quotidien répétitif, et surtout de ce qu'il ne bande plus. Son couple se délite, sa femme vieillit et se tue à la tâche dans une usine de médicaments. A l'heure où la révolution contre le capitalisme gronde, Albert s'éloigne et se réjouit des menus avantages que peut lui procurer son nouveau statut de professeur. Cependant, au contact d'une Apolline solaire qui ne pourra jamais apprendre à lire, Albert s'ouvre à un autre monde, fait de musique, de poésie et de joie, tandis que la lutte continue entre patrons et ouvriers. Un récit tour à tour sombre et lumineux, écrit dans une belle langue qui n'a pas peur des mots crus tout en laissant la part belle à la poésie. Moins un récit d'anticipation, finalement, qu'un beau récit intimiste.
Catégorie : Anticipation
abeilles / arbres / condition ouvrière / inégalités sociales /
Posté le 16/09/2020 à 17:28