"J’ ai eu une vie m’apprenant qu’ "il est dans la nature de l’ homme de piétiner ce qui est à terre "" (Eschyle)


En cette fin de printemps, portée, soulevée, retombée sous les souffles multiples du zéphyr, je me suis laissée transporter de gestes naturels, de place en place 

Pour me retrouver là, sur la souche d’ un érable qui y avait pris naissance il y a un siècle

Aujourd’hui c’ est le trèfle et le lierre qui y règnent 

Au commencement c’était cet érable, fier et droit qui apportait son ombre et son amour


Claire 

J’ai eu une vie superbe, j’ai eu mille vies

Hivers et été, automnes et printemps, sur notre tronc nous traversions

J’ai aspergé un lychen solitaire

Dénaturé de mon lot, j’ai d’un geste fondu  Pris à part.

La puissance solaire  Nous laissions passer à travers vous

Unanimement, nous autres cristaux.

Obéissant « Qu’en lui »  la nature vaincre on ne peut

Parfaite unité de ton, comme neige

J’ai eu une vie blanche


Au commencement

Alain

J’ai eu une Vie

J’en ai accueilli…des petits, des grands, des drôles, des timides, des espiègles, des roux, des petits gros, des filous, des chefs de bandes

Avec leur cœur débordant de générosité, je les ai vus architectes et bâtisseurs de Joie et de Jeux

Ils ont ramassé branches, feuilles, brindilles, pommes de pins, terre, brins d’herbe et ils ont construit

Souvent ils ont chapardé les outils

Ils m’ont donné naissance

Je suis devenu Espace secret, Refuge onirique, Gardien de leurs découvertes et Ailleurs étoilé de cette parcelle de Vie à choyer

Ils y ont mis leur enthousiasme, leurs rêves, leurs espérances sous le regard bienveillant des grands arbres

Ne dit-on pas que le plus grand ouvrier de la Nature est le temps ?

Au commencement, j’étais un espace vide

Ils étaient une bande de copains et copines

Ils m’ont donné Mouvement, Corps et Âme d’enfants

Moi…leur Cabane.


Myriam

J'ai eu une vie de fleur de trèfle, ce n'est pas donné à tout le monde.

Je suis princesse des prairies avec mes sœurs pâquerettes et nous savons que nous avons été créées pour être mangées par les moutons comme qui finit dans la gueule du loup.

  Edgar  Morin dit " qu'il y a moins de désordre dans la nature que dans l'humanité ". Moi je pense que l'humanité fait justement partie de la nature.

 La  nature c'est notre origine, notre source, notre histoire. 

 Moi, comme toutes les fleurs de trèfle, je me dresse et je fais la belle au milieu de mes pétales, trois feuilles, quatre feuilles. Je sens le vent qui me renverse ou qui me berce, la pluie qui me rafraîchit et le soleil qui me sèche.

 Au  commencement, une brume magique baignait les sols. Puis la glace fit son œuvre et le soleil réchauffa enfin la vie cachée dans chaque grain de terre. Tout ça pour moi, pour que je sois là, petite fleur de trèfle avec toi.

Gilles

J’ai eu une vie heureuse. J’ai découvert la douceur de vivre et la beauté d’êtres merveilleux.


Zut, j’ai volé loin de mes amis, emporté par le vent. Un blaireau s’en allait au loin, j’ai débaroulé jusqu’à me poser, à terre, dans son empreinte.

Le grenier d’une grange, après avoir senti une élévation. J’ai vu les jeux des enfants sur moi. J’ai vu la nudité de deux jeunes amants.

Agglutiné contre mes amis, je me suis retrouvé un matin très en hauteur. Je suis devenu moins souple, à mesure que l’eau s’échappait de moi. Mon voisin a été emporté par un geai. Sur d’autres voisins disposés les uns sur les autres, en rond, il l’a posé dans un arbre. Cet amoncellement dont je ne connais ni le mot, ni l’utilité. « Si quelque chose est dit sur la nature, alors ce n’est déjà plus la nature ».

Au commencement, j’ai grandi, sorti du néant. Ou d’une graine ? Dans un champ, je frémissais, vert. Mes semblables transpercés de lumière.

De mon ami le grain, du métal m’a séparé.

Moi, brin de paille

Nadia F.

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Crédit photo :  Eric Olivier